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Vénus et Adonis

1560 / 1565 (3e quart du XVIe siècle)
Cambiaso, Luca
Italie, École de
RF 2008 49
Département des Peintures
Actuellement visible au Louvre
Salle 712
Aile Denon, Niveau 1
Numéro d’inventaire
Numéro principal : RF 2008 49
Artiste / Auteur / Ecole / Centre artistique
Cambiaso, Luca dit aussi , Le Cangiage, Luchetto da Genova, Le Lucheto (Moneglia, 1527 - Madrid, 1585)
Italie École de

description

Dénomination / Titre
Titre : Vénus et Adonis
Description / Décor

Caractéristiques matérielles

Dimensions
Hauteur : 1,88 m ; Hauteur avec accessoire : 2,165 m ; Largeur : 1,05 m ; Largeur avec accessoire : 1,335 m
Matière et technique
huile sur toile

Lieux et dates

Date de création / fabrication
3e quart du XVIe siècle (vers 1560 - 1565)

Données historiques

Historique de l'œuvre
Provenance :
Collection des princes Buoncompagni à Florence (selon B. Suida Manning, 1962); à Gênes, chez l'antiquaire Costantino Negro (1894-1967) et attesté depuis 1956 (selon l'exposition à Gênes de la même année); dans une collection privée à Gênes en 1987 (selon une mention de P. Torriti "Luca Cambiaso" dans La Pittura a Genova e in Liguria. Dagli inizi al cinquecento, Milan, 1987); Lugano (coll. part.); commerce d'art à Paris (Galerie Canesso, dès 2007 selon l'exposition à Gênes de la même année) ; acquis en 2008 grâce à la Société des Amis du Louvre.

Commentaire :
Un chef d’œuvre de la deuxième manière du peintre
Luca Cambiaso est considéré comme le principal maître de Gênes dans la seconde moitié du XVIe siècle. La distinction de trois différentes manières dans sa carrière a été proposée dès 1674 par Raffaello Soprani dans Les Vies des peintres, sculpteurs et architectes génois, et a toujours été respectée par l’historiographie successive, car elle différencie clairement les principaux chapitres de l’évolution de l’artiste, du maniérisme impétueux de ses débuts à l’austérité formelle de sa dernière période. Ce constant renouvellement d’inspiration s’explique par de probables voyages dans les grands centres artistiques italiens, dont Rome et Venise, mais aussi par les échanges fructueux qu’il entretint avec les principaux artistes actifs à Gênes, notamment l’architecte Galeazzo Alessi et le peintre Giovanni Battista Castello, dit Il Bergamasco.

Une inspiration vénitienne
Vers le milieu du siècle, Cambiaso apaise sa première manière inspirée du maniérisme toscano-romain, pour adopter des formes plus mesurées dans des compositions souvent structurées par des architectures monumentales. Dans les années 1560, son amitié avec Valerio Corte, collectionneur et copiste de tableaux de Titien et de Véronèse, le tourne vers la Lagune et donne à sa deuxième manière une teinte vénitienne. La découverte des grandes mythologies sensuelles, les fameuses poesie, que Titien envoie en ces années au roi Philippe II d’Espagne l’encourage à peindre sur toile, alors qu’il privilégiait le bois, de nouveaux sujets plus érotiques.

Un sujet de prédilection
Parmi les thèmes qu’il aborde, c’est l’histoire de Vénus et Adonis, racontée par Ovide dans les Métamorphoses, qui retient le plus son imagination. Une vingtaine de compositions dessinées, originales et copies, nous montre les multiples variations que lui inspirent les trois principaux épisodes de la fable : les amours de Vénus avec le jeune homme, la déesse retenant son amant partant pour la chasse, et la mort du héros. On connaît également quatre peintures autographes sur ce sujet.
Dans cet ensemble, deux feuilles présentent des similitudes avec le tableau du Louvre, surtout celui conservé à Göttingen où les personnages sont dans des poses identiques mais avec moins d’énergie, Vénus semblant donner une dernière recommandation avant de laisser Adonis partir pour la chasse. C’est finalement dans la version peinte que l’iconographie se précise. Cambiaso a conservé du dessin le genou plié d’Adonis qui semble annoncer le départ pour la chasse, mais Vénus s’est rapprochée de son amant, son sein l’effleure et l’entraîne pour s’étendre sous l’arbre. « Voici qu’opportunément un peuplier nous offre son ombrage accueillant et le gazon une couche ; j’ai envie de m’y reposer en ta compagnie ». On entend ces mots d’Ovide dans la bouche entrouverte de Vénus qui convainc Adonis de rester auprès d’elle. Cambiaso est parvenu à rendre le dynamisme de cet instant où l’hésitation cède à la passion. Le jeune homme, les yeux baissés sur le corps offert, esquisse un sourire à son tour, Cupidon libère les deux chiens tenus encore en laisse par leur maître, les amants s’allongent…

Une poésie picturale et sensuelle
La pyramide formée par les deux corps qui se rejoignent semble symboliser cette harmonie amoureuse et l’union prochaine. L’attention portée par le peintre à la tonalité des carnations, plus claire chez la femme, accentue encore la sensualité de la scène. En pleine lumière, Vénus s’offre au regard de son amant dans une entière nudité, le sexe découvert. Notons cependant que les analyses conduites au Centre de Recherche et de Restauration des Musées de France ont révélé des traces de nettoyage dans cette zone, ce qui laisse penser qu’il y eut autrefois un voile de pudeur, dans l’esprit de celui visible dans un tableau contemporain, Vénus et Adonis du Palazzo Bianco de Gênes. Ce léger tissu pourrait d’ailleurs être le prolongement de celui qu’on remarque dans les cheveux de Vénus et le long d’une partie de son dos.
La pose de la déesse qui cherche à entraîner Adonis au plaisir semble s’inspirer des plus célèbres nus antiques et modernes. Son bras levé au-dessus de la tête évoque les femmes abandonnées au sommeil, à l’instar de l’Ariane antique du Vatican réincarnée dans les Vénus endormies de Giorgione et de Titien. Mais c’est aussi l’attitude des femmes violentées, chez les Vénitiens comme dans d’autres œuvres de Cambiaso. L’artiste tire peut-être davantage son inspiration des gravures pornographiques de son siècle, notamment les célèbres Modi gravés par Marc Antonio Raimondi d’après Jules Romain, où les femmes allongées de tout leur long sur un lit adoptent presque systématiquement cette pose au bras extatique. La composition de Cambiaso ressemble d’ailleurs beaucoup à une gravure représentant Jupiter et Sémélé, attribuée à l’entourage de Raimondi. L’œuvre échappe néanmoins à la vulgarité de ces sources. Cambiaso compose un véritable poème érotique où les formes suggestives s’assemblent dans une expression d’une subtile sensualité picturale.
Des mythologies de Corrège, principalement L’Education de l’Amour (National Gallery, Londres) et surtout Vénus avec Cupidon et un satyre (musée du Louvre, Paris), Cambiaso garde l’idée d’une palette restreinte pour laisser la primauté à la sensualité des carnations qui prennent vie par des accords de bleus et de roses subtilement mélangés aux blancs et aux bruns. Discrètement, il en rehausse l’éclat par des teintes raffinées, limitées à quelques détails comme les mariages de bleu-gris, de jaune et de rose sur les jambières d’Adonis. Mais c’est la lumière avec ses délicats passages vers l’ombre, soigneusement rendus sur les corps jusqu’au détail de la laisse du chien dont l’ombre est portée sur la cuisse d’Adonis, qui crée l’atmosphère sensuelle et poétique. Ces corps resplendissent sur le fond obscurci des feuillages, rapidement brossés avec des bruns et des verts, à peine ouvert sur un paysage aux chaudes tonalités vénitiennes.

Un modèle pour l’art génois
Cambiaso propose dans cette œuvre une synthèse originale d’une part du naturalisme des Vénitiens et de Corrège, et d’autre part de son héritage maniériste dont relèvent le raccourci et le mouvement ascendant de la jambe gauche d’Adonis ainsi que le fort contrapposto de Vénus. Avec une habileté rarement égalée chez lui, l’artiste démontre la prestezza (rapidité et vivacité d’exécution) qui faisait sa réputation de grand fresquiste. Sa touche est vive, fluide et très sûre. Le tableau s’impose comme un des derniers joyaux de l’artiste parvenu au faîte de sa maîtrise picturale en ce milieu des années 1560. Ce sont les œuvres de cette période qui furent particulièrement admirées par les peintres des générations successives dont Rubens qui séjourné à Gênes. Dans sa troisième manière, très célèbre, Cambiaso simplifia son style, en géométrisant les formes, en limitant sa palette, et en privilégiant les effets de nocturne.
(Texte de Vincent Delieuvin, juillet 2021)
Détenteur précédent / commanditaire / dédicataire
Mode d’acquisition
don manuel
Date d’acquisition
date de comité/commission : 07/05/2008
date du conseil : 14/05/2008
date de l'arrêté/décision : 14/05/2008
Propriétaire
Etat
Affectataire
Musée du Louvre, Département des Peintures

Localisation de l'œuvre

Emplacement actuel
Denon, [Peint] Salle 712 - Grande Galerie, Salle 712 - (3e travée)

Index

Mode d'acquisition

Bibliographie

- Musée des Beaux-Arts de Nancy (dir.), L'Automne de la Renaissance d'Arcimboldo à Caravage, cat. exp. (Nancy, Musée des Beaux-Arts, avec la collaboration du musée du Louvre, 4 mai - 4 août 2013), Paris, Somogy éditions d'art, 2013, p. 328, 329, coul, p. 329, n° 117
- Lavergne-Durey, Valérie ; Volle, Christian (dir.), Album amicorum. Œuvres choisies pour Arnauld Brejon de Lavergnée, Trouville-sur-Mer, Editions Librairie des Musées, 2012, p. 30
- Mancini, Federica, Luca Cambiaso, [Musée du Louvre, département des arts graphiques], Milan / Paris, 5 Continents Éditions / Musée du Louvre, 2010,
- Delieuvin, Vincent, « Le tableau du mois n° 157: Vénus et Adonis de Luca Cambiaso, une poésie érotique de la Renaissance - Un don de la Société des Amis du Louvre », Tableau du mois, 157, du 5 novembre au 1er décembre 2008, 2008, 1-4, p. 1-4, n&b, p. 1

Expositions

- Galerie du Temps (année 3), Louvre-Lens, Galerie du Temps, 04/12/2014 - 04/12/2015
- L'Automne de la Renaissance, Nancy (France), Musée des Beaux-Arts, 04/05/2013 - 04/08/2013
- Dessins de Luca Cambiaso, Denon, [Peint] Salle 8 I - Passage Mollien, 10/11/2010 - 15/02/2011
Dernière mise à jour le 18.03.2024
Le contenu de cette notice ne reflète pas nécessairement le dernier état des connaissances