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Apollon et Diane

Vers 1480/1499
Barbari, Jacopo de', gravé par
4098 LR/ Recto
Département des Arts graphiques
Numéro d’inventaire
4098 LR/ Recto
Anciens numéros d'inventaire :
16865
Référence de l'inventaire manuscrit :
vol.3, p.5
Collection
Département des Arts graphiques
Collection Edmond de Rothschild
Artiste / Auteur / Ecole / Centre artistique
Barbari, Jacopo de' (vers 1460/1470-avant 1516), gravé par
Ecole vénitienne

description

Dénomination / Titre
Apollon et Diane
Description / Décor
Commentaire :
Une autre épreuve de cette œuvre est conservée à la Bibliothèque nationale de France ( Ea 49 rés. Cl. 74 B 66996) (G. Lambert, 1999).
"La Tentation de deux ermites et la Fortune sur un globe sont deux excellents exemples de burins qu'Altdorfer exécuta au cours de la première décennie du xvie siècle. La Tentation est une des premières gravures datées de l'artiste. La manière dont Altdorfer manie le burin n'est pas classique : l'artiste ne l'emploie pas pour faire des tailles régulières qui dessinent les chairs et donnent de la profondeur à l'espace, sa technique répond plutôt à une recherche d'un effet de clair-obscur. L'arrière-plan est composé d'un quadrillage qui laisse à peine passer quelques points de lumière. Les tailles elles-mêmes sont exécutées de sorte qu'un trait blanc ressorte, comme on le voit sur le contour du tronc de l'arbre derrière la femme ou le long du bras de l'ermite représenté au milieu de la composition. Les deux personnages féminins, dont le corps est parcouru de fines lignes qui le modèlent, semblent émerger de l'obscurité, ce qui correspond à l'intention iconographique qu'Altdorfer souhaite donner à ces deux estampes. Le dessin de l'anatomie est assez comparable dans les deux gravures, mais la différence entre les deux feuilles réside dans la technique du burin, qui apparaît plus complexe dans la Fortune, avec des effets de gris et de matière dans les plumes des ailes de l'allégorie qui constituent un plan en transition entre le fond noir et le corps lumineux de la Fortune. Le modelé du corps est également davantage prononcé.Les deux estampes mettent en garde contre la séduction féminine. Dans la Tentation
de deux ermites, le démon apparaît à deux ascètes qui se sont retirés dans une forêt : il a les traits d'une femme nue et leur tend un plat chargé de victuailles. L'un et l'autre n'ont guère d'hésitation devant une telle vision : ils lui opposent un crucifix et l'un d'eux place sa main devant son visage comme pour se protéger de la lumière qui émane du corps du personnage féminin, peut-être aussi pour se tenir à distance de cette fulgurante beauté. La tentatrice est, d'une certaine manière, une cousine des Sorcières qu'Altdorfer dessine la même année (cat. 15a), et dont l'action se situe également dans une forêt, lieu symbolisant à la fois l'isolement, la mise à l'épreuve et la marginalité, car s'y déroulent toutes sortes d'activités réprouvées par la société. La marmite et la saucisse enroulée sur une pique représentées dans la partie gauche de l'estampe constituent souvent l'attirail des sorcières, de même que les flammes vacillantes et les volutes de fumée, qui témoignent du caractère démoniaque de l'apparition. Dans la Fortune, l'allégorie féminine aux longs cheveux dénoués est debout en équilibre sur une sphère, aux côtés de Cupidon aveugle, monté sur des échasses, qu'elle agrippe fermement par le poignet pour l'empêcher de chuter. Cette iconographie qu'Albrecht Altdorfer emprunte à Dürer, lequel l'a formulée une dizaine d'années plus tôt que la combinaison de la Petite Fortune1, vers 1495, ou de la Grande Fortune2, 1502, et du Songe du docteur3, vers 1498, pour le Cupidon aux échasses), se comprend comme une allégorie de l'Incertitude du destin humain, qui, lorsqu'elle est associée à un Éros ailé, désigne les affres et les inconstances de l'amour et, de manière plus générale, la difficulté à connaître le bonheur. Sans doute pour se démarquer de son prédécesseur, Altdorfer représente la Fortune de manière frontale et non de profil. Le mouvement de cette déesse sur son globe l'intéresse peut-être moins qu'une frontalité permettant d'interpeller et de susciter le trouble chez l'observateur.
En effet, le véritable enjeu de ces deux estampes est pour Altdorfer de dessiner un nu féminin. Il y travaille avec deux modèles en tête : Albrecht Dürer et Jacopo de' Barbari. Du premier, il ne retient que l'iconographie et rejette les proportions bien équilibrées. Le second lui est davantage une source d'inspiration. De l'estampe Apollon et Diane, Altdorfer reprend les épaules tombantes, la poitrine menue et la pose du dieu pour représenter sa figure tentatrice. Mais en aucun cas il ne s'astreint à respecter l'équilibre harmonieux de chaque partie du corps ou le modelé musculeux et anatomique de la silhouette que l'artiste italien a gravée avec assurance. La femme apparaissant aux deux ermites est curieusement construite, le bassin large, les cuisses lourdes, dont la liaison avec les genoux est pour le moins maladroite. Le fin modelé interne des deux nus, ainsi que la manière de cerner en des tailles incurvées la surface des troncs d'arbre de l'estampe de la Tentation proviennent également de l'art de
Barbari. Altdorfer a donc eu connaissance des estampes de l'artiste italien, qui circulaient alors en Allemagne d'autant plus facilement que celui-ci avait séjourné à Nuremberg en 1501, avant de s'établir à la cour de Saxe vers 1503. On ne sait si Jacopo de' Barbari a gravé Apollon et Diane avant ou pendant son séjour en Allemagne, mais, dans les deux cas, Altdorfer l'incorpore très rapidement dans sa réflexion stylistique. En 1506, il fit également un autre burin, Mars4, qui témoigne de l'influence que Barbari exerçait alors sur lui. Altdorfer dessine le dieu dans une pose similaire à celle d'Apollon, les deux pieds écartés et campés sur le sol, reprenant fidèlement l'idée de la jambe droite en extension tandis que celle de gauche sert d'appui pour le reste du corps, représenté de face. Les deux gravures ne nous sont parvenues qu'en un petit nombre d'exemplaires : deux pour la Tentation (Berlin et Vienne, l'épreuve exposée) et quatre pour la Fortune (Berlin, Hambourg, Londres et Vienne, l'épreuve exposée), indiquant sans doute un faible tirage de ses premières estampes. À cette époque, Altdorfer n'avait sans doute pas l'intention de vivre du commerce de ses gravures, et concevait ce medium comme un champ d'expérimentation pour la formation de son style. (1. Schoch, Mende et Scherbaum 2001-2004, I, no 5. 2. Schoch, Mende et Scherbaum 2001-2004, I, no 33. 3. Schoch, Mende et Scherbaum 2001-2004, I, no 18. 4. Winzinger 1963a, no 95; Mielke 1997, no e. 34)" (S. Lepape, 2020).

Bibliographie :
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D. Landau in 'The Genius of Venice1500-1600', J. Martineau et Ch. Hope, cat. exp. Londres, Royal Academy of Art, 1983-1984, n° P1
G. Lambert, 'Les premières gravures italiennes. Quattrocento début du Cinquecento', Bibliothèque nationale de France, Paris, 1999, p. 321, n°608
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G. Messling, 'Cranach et son temps', cat. exp. Bruxelles, Palais des Beaux-Arts et Paris, musée du Luxembourg, 2010-2011, Paris, 2010, n° 104
J. Sander, 'Dürer Kunst-Künstler-Kontext', cat. exp. Francfort, Städel Museum, 2013-2014, Francfort, 2013, no 5, 11
B. Böckem, 'Jacopo de'Barbari, Künstlerschaft und Hofkultur um 1500, Cologne, Weimar et Vienne, 2016, p. 114-121.
S. Lepape in 'Albrecht Altdorfer. Maître de la Renaissance allemande', Hélène Grollemund, Olivia Savatier Sjöholm, Séverine Lepape, cat. exp. Paris, musée du Louvre, 1er octobre 2020 - 4 janvier 2021, Paris, 2020, n° 7c, pp. 62-63, repr. p. 63

Caractéristiques matérielles

Dimensions
Dimensions à la feuille : H. 0,16 m ; L. 0,1 m
Dimensions au coup de planche : H. 0,16 m ; L. 0,1 m
Matière et technique
Rognée au coup de planche. Signée du caducée en haut, à gauche
Filigrane : couronne proche de Briquet n° 4921 ;

Lieux et dates

Date de création / fabrication
Vers 1480/1499

Données historiques

Historique de l'œuvre
Œuvre conservée dans le portefeuille n°172 du baron Edmond de Rothschild jusqu'en 2018.
Détenteur précédent / commanditaire / dédicataire
Dernière provenance : Rothschild, baron Edmond de
Mode d’acquisition
don
Date d’acquisition
1935

Localisation de l'œuvre

Emplacement actuel
Réserve Edmond de Rothschild, petit format

L'œuvre est visible sur rendez-vous en salle de consultation des Arts graphiques.

Index

Collections
Personnes
Techniques

Expositions

- Albrecht Altdorfer. Maître de la Renaissance allemande
Etape :
Musée du Louvre, Paris, France - 01 octobre 2020 - 08 mars 2021
- Le XVIe siècle européen. Gravures et dessins du Cabinet Edmond de Rothschild
Etape :
Musée du Louvre-Département des Arts Graphiques, Paris, France - 01 octobre 1965 - 01 janvier 1966
Dernière mise à jour le 25.08.2023
Le contenu de cette notice ne reflète pas nécessairement le dernier état des connaissances