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Autoportrait, jeune.

1767
RF 41200, Recto
Département des Arts graphiques
Numéro d’inventaire
RF 41200, Recto
Référence de l'inventaire manuscrit :
vol.31, p.20
Collection
Département des Arts graphiques
Cabinet des dessins
Fonds des dessins et miniatures
Artiste / Auteur / Ecole / Centre artistique
Ducreux, Joseph (1735-1802)
Ecole française

description

Dénomination / Titre
Autoportrait, jeune.
Description / Décor
Commentaire :
Presque de face, il tient une palette qui porte sa signature : 'Ducreux / 1767'. Cet Autoportrait jeune est en relation avec cet autoportrait aux cheveux longs au naturel (INV.26294) réalisé vers 1798.
Neil Jeffares donne le pastel à Joseph Ducreux et l'identification du modèle, Autoportrait tenant une palette, (Dictionary of pastellists before 1800, Londres, 2006, p. 164).

En 1985, le musée du Louvre a pu réunir le premier autoportrait connu de Joseph Ducreux, daté de 1767, et l'un des tout derniers, généralement considéré comme peint vers 1798, soit quatre ans avant que l'artiste ne meure subitement « d'un coup de sang ou de quelques crevasses de quelques gros vaisseaux » (lettre de Robière, ami de l'artiste, citée par Lyon, 1958, p. 109) à huit heures du matin sur la route de Paris à Saint-Denis, le 5 thermidor an X, soit le 24 juillet 1802. Quelques jours plus tard, le 11 thermidor, le Journal des Débats rendait compte de cette disparition tout en précisant que l'artiste s'était complu à se représenter lui-même à tous les Salons et sous des aspects différents. On l'avait ainsi successivement vu bâillant, dormant, riant ou en joueur désespéré (Lyon,1958, p. 110). Ducreux compte assurément parmi les maîtres qui aimèrent à multiplier leur propre image. Entre 1767, année au cours de laquelle il se représente en jeune homme élégant avec sa palette, et 1798, année où il expose au Salon une « étude d'après l'auteur. Ovale » (no 137) où l'on a proposé de reconnaître l'autoportrait aux cheveux longs au naturel, l'artiste a ainsi peint à l'huile et au pastel plus d'une trentaine d'autoportraits, dont certains reproduisent à plusieurs reprises la même composition. Pour la plupart, ces œuvres sont postérieures à 1783. Cette année-là, Ducreux exposa à Paris au Salon de la Correspondance, en l'hôtel de Villayer, rue Saint-André-des-Arts, un autoportrait où il s'était représenté à mi-corps, vêtu d'une redingote rouge, en train de bâiller, et un autre, au pastel, où il apparaissait riant. Au début de l'année 1791, à Londres où il avait momentanément trouvé refuge, l'artiste présentait à la Royal Academy un autoportrait et des têtes d'expression incarnant la surprise mêlée de terreur et la surprise pour lesquelles il avait utilisé ses traits. Il donnait aussi trois estampes, publiées le 21 février, où il apparaissait cette fois en joueur éploré, en rieur et en discret. De retour à Paris, Ducreux compta naturellement parmi les artistes non académiciens qui exposèrent au premier Salon ouvert à tous par décret de l'Assemblée nationale. L'autoportrait bâillant de 1783 fut à nouveau montré (no 698) à proximité d'un portrait d'homme ovale intitulé « Le Silence » (no 47) où l'on doit probablement encore reconnaître le maître. Au Salon de 1793 prit place l'autoportrait en moqueur qui montre du doigt (no 240). L'œuvre ne convainquit pas, jugée d'une expression chargée, la couleur sale, la main droite trop petite, l'autre peu heureuse (Paris, BnF, collection Deloynes, no 458),mais fit cependant l'objet de plusieurs versions peintes à l'huile, dont celle conservée au musée du Louvre (fig. 16. Inv. RF 2261. Don Frédéric Anthony White en 1920). Au Salon de 1795, l'artiste paraissait en rieur (no 160). Un critique anonyme soulignait alors : « S'il faut tâcher d'intéresser par un sentiment vif et profond, il faut encore plus prendre garde de ne pas changer la nature comme le fait le citoyen Ducreux dans son propre portrait no 160, son regard, dit-on, est vif et sérieux et il s'est donné un rire forcé qui ne rend pas le caractère qui lui est propre, il en est de même de son exécution dans laquelle on trouve de la dureté soit dans le passage des ombres aux clairs, soit dans le pinceau, soit enfin dans les tons de couleurs. Malgré ces défauts qui, de la part d'un jeune homme, seraient un mal sans remède parce qu'il montre un esprit sistématique, malgré cela, disje, le mérite de la ressemblance donne toujours au citoyen Ducreux beaucoup d'emploi » (Paris, BnF, collection Deloynes, t. 18, p. 424,cité par Lyon, 1958, p. 102). En 1795, sur la liste de ses œuvres, Ducreux précisait aussi qu'il s'était représenté en cheveux (étude) et en perruque. L'année suivante, face à un nouvel autoportrait (no 145.Étude d'expression), la critique finissait par s'agacer. Peinte au pastel et décrivant le modèle la bouche ouverte, coiffé d'une toque de fourrure (vente à Louviers, 2 décembre 2012, Me Prunier, lot 49, repr.), l'œuvre appela un long commentaire dans le Mercure de France des 20 et 30 frimaire an V (p. 89-95, 158) : « Ducreux, peint par lui-même, dit le livret. C'est donc un bel homme ou du moins il a une belle tête car on dit qu'il se place à tous les Salons ! Regardès-le, c'est cette tête coeffée d'un bonnet de fourrure, ouvrant la bouche, montrant les dents et grimaçant pour avoir l'air de rire. - Mais cette figure est ignoble, elle ne rit pas des yeux. - Attendès... je cherche dans ma mémoire... j'y suis... c'est bien là cette hideuse figure qui, au Salon de l'an quatre... montrait le poing aux spectateurs ?... N'est-ce pas la même encore qui, au Salon de l'an trois, bâillait à se fendre les joues jusqu'aux oreilles ? - Quelle mémoire ! - Dites donc, quel mauvais goût de se présenter sans cesse au Salon et de se présenter toujours dans quelque attitude basse et triviale !... C'est donc le grimacier des boulevards » (cité par Lyon, 1958, p. 104-105). Le maître n'en eut cure et exposa au Salon de 1798 une nouvelle « étude d'après l'auteur » (no 137) et à celui de 1799, une dernière fois, deux autres autoportraits (un seul cité au livret sous le numéro 90). Le Mercure de France s'en faisait à nouveau l'écho en 1798 : « Quoi, vous aimés que ce bel art, égalé à la poésie par Horace, soit avili jusqu'à représenter un homme tantôt bâillant, tantôt faisant la nique aux spectateurs. Si cela est du naturel et que l'on recherche cette sorte de naturel, je ne vois pas où s'arrêtera le citoyen Ducreux et je ne voudrais pas assurer qu'il ne s'ôffrit au public satisfaisant des besoins plus secrets que ceux de bâiller » (ibid., p. 105). En 1799, les avis demeuraient partagés. Le journal des arts du 5 fructidor an VII (Examen du Salon de l'an VII) soulignait le parti pris de l'omniprésence : « Le citoyen Ducreux semble avoir pris l'engagement d'offrir chaque année au public son propre portrait. Plus libéral aujourd'hui, il en a exposé deux dont l'un est peint en pied dans l'attitude furieuse d'un joueur qui vient de perdre sa fortune ; on ne peut nier qu'une collection d'après le même original ne soit fort intéressante pour sa famille. Cela peut former une galerie complète et graduée. Nous avons remarqué que les traits de Ducreux ont toujours un caractère très prononcé, nous pensons aussi que moyennant la grande habitude qu'il a de se peindre lui-même, il le fait maintenant sans le secours d'un miroir et purement de souvenir. Nous espérons voir encore à l'exposition prochaine le portrait de l'auteur sous quelque aspect nouveau » (ibid., p. 106). Pour Chaussard, dans La Décade philosophique, le procédé n'était pas défendable : « Il est des artistes qui par de continuels efforts cherchent à s'élever au sentiment du beau. Cet artiste n'a que celui de la laideur et il a tenté d'en éterniser le modèle en le multipliant. Vous avès vu cette effigie grimaçante sur les quais, dans les dernière expositions, sur les ponts, vous la retrouvès encore ici. La voilà dans le personnage de Beverley. On ne peut refuser à cet artiste de la fougue. Mais quelle incorrection ! Cette manière heurtée, ce faire expéditif ne sont plus recevables aujourd'huy » (ibid., p. 106-107). Entre l'autoportrait de 1767, œuvre sage d'un pastelliste en devenir, et l'autoportrait aux cheveux longs au naturel peint dans les dernières années, après 1796, où l'homme nous apparaît sans flatterie et tout en introspection, il s'est indéniablement passé quelque chose. À nos yeux, il s'agit de la rencontre avec Maurice Quentin de La Tour, qui ne peut être contemporaine de son arrivée à Paris vers 1760, comme le pensaient Prosper Dorbec dès 1906 et, à sa suite, tous ceux qui s'intéressèrent au maître, à l'exception de Georgette Lyon, qui s'interrogeait également. Le pastelliste des années 1760,celui qui fixe les traits des princesses de la famille royale, puis des princesses et des princes de la famille impériale, et à nouveau ceux de Madame Clotilde en 1775, n'est encore qu'un praticien habile, seulement capable de donner de jolies images sans profondeur psychologique. C'est sans doute pourquoi il n'est désigné en 1776 par l'Almanach historique de l'abbé Lebrun qu'en « peintre de portraits à l'huile, miniature et au pastel [...] très-habile homme qui fut envoyé à Vienne, pour y peindre l'Archiduchesse, aujourd'hui notre Reine » et en 1781, à l'occasion du Salon de la Correspondance, comme « premier Peintre de la Reine ». Il faut en effet attendre 1783 et l'exposition à l'hôtel de Villayer du portrait au pastel de l'actrice Mlle Fel pour que le nom de Ducreux soit enfin associé à celui de La Tour. D'une touche légère et fine qui indiquait avec peu des plans bien dessinés, des accessoires faits par méplats et dont le brillant s'accordait très bien avec le ton des chairs qui étaient d'une couleur vraie, l 'œuvre annonçait, selon Pahin de La Blancherie, un « artiste plein des leçons du célèbre La Tour » (Nouvelles de la République des Lettres et des Arts, cité par Lyon, 1958, p. 73). La même année, Ducreux montrait aussi son autoportrait en rieur, indéniable hommage à l'autoportrait dit « à l'index » ou « à la croisée », ou bien encore « en Démocrite »,dont Maurice Quentin de La Tour avait exposé la première version au Salon de 1737 sous le titre « L'auteur qui rit » (voir cat. 78). En 1786, à l'occasion de la présentation au Salon de la Correspondance du portrait de Mlle d'Éon, célèbre travesti, la critique avait souligné qu'en réunissant dans le genre du portrait à l'huile et au pastel le mérite de la ressemblance et celui d'une bonne exécution, Ducreux s'était montré digne élève du célèbre M. de La Tour. Le livret du Salon de 1796 le qualifiait d'élève du maître. Dans son testament de 1784, Maurice Quentin prenait soin d'offrir à Ducreux le portrait qu'il avait conservé de lui. La rencontre avec le maître vieillissant devait en fait être de peu antérieure, peut-être lorsque le jeune pastelliste avait fixé les traits de Marie Fel. Un enseignement ou de simples conseils furent-ils alors dispensés ? Aucun document ne permet aujourd'hui de le dire. Mais le choc dut être important, car, sinon, comment expliquer la succession des autoportraits, véritable quête introspective et indéniable moyen de se faire connaître, comment comprendre les changements techniques et le sens exacerbé du réalisme et de la psychologie si peu perceptible avant 1783 ? (Xavier Salmon, Pastels du musée du Louvre XVIIe -XVIIIe siècles, Louvre éditions, Hazan, Paris, 2018, cat. 50, p.113-115).

neiljeffares.wordpress.com/2018/07/12/the-louvre-pastels-catalogue-errata-and-observations, n° 50.

Caractéristiques matérielles

Dimensions
H. 0,664 m ; L. 0,545 m
Matière et technique
Pastel. sur cinq feuilles de papier bleu-gris assemblées à joints couvrants collées en plein sur un carton. Pièce de papier brun ajoutée en partie supérieure. Trait au crayon sur le pastel pour mise à l'ovale. Signé et daté au pastel sur la palette en bas à droite : Ducreux / 1767. Pièce de papier ancienne rapportée sur le carton de protection arrière portant à la plume et encre brune Ducreux Joseph né à Nancy 1737-1802 /Portrait de l'artiste. Par lui-même.
Les mesures du cadre sont : H : 00,75 ; L : 00,64 et profondeur : 00,04.
Forme
ovale

Lieux et dates

Date de création / fabrication
1767

Données historiques

Historique de l'œuvre
Collection Jean Dubois, sa vente, Paris, hôtel Drouot, Me Chevallier,7 mars 1901, lot 13, repr., adjugé 2 150 francs à Salomon Reinach. Cité en 1911 et 1958 dans la collection d'André Rheims. Legs d'André Rheims au musée du Louvre en 1985.
Détenteur précédent / commanditaire / dédicataire
Dernière provenance : Rheims, André
Mode d’acquisition
legs
Date d’acquisition
1985

Localisation de l'œuvre

Emplacement actuel
Réserve des pastels

L'œuvre est visible sur rendez-vous en salle de consultation des Arts graphiques.

Index

Collections
Sujets
Techniques

Expositions

- En société. Pastels du musée du Louvre XVIIe-XVIIIe siècles
Etape :
Musée du Louvre, Paris, France - 06 juin - 10 septembre 2018
- Accrochage de pastels
Etape :
Musée du Louvre, Paris, France - 18 décembre 2002 - 03 novembre 2003
Organisée par : Musée du Louvre-Département des Arts Graphiques (Paris, France)
- Autoportraits, études et portrait. Pastels français des XVIIIe et XIXe siècles
Etape :
Musée du Louvre, Paris, France - 10 février - 04 octobre 1999
Organisée par : Musée du Louvre-Département des Arts Graphiques (Paris, France)
- Pastels du XVIIIe siècle
Etape :
Musée du Louvre, Paris, France - 16 avril - 31 octobre 1996
Organisée par : Musée du Louvre-Département des Arts Graphiques (Paris, France)
- Acquisitions 1984 - 1989 : 96e exposition du Cabinet des dessins
Etape :
Musée du Louvre, Paris, France - 31 mai - 27 août 1990
Organisée par : Musée du Louvre-Département des Arts Graphiques (Paris, France), Musée du Louvre (Paris, France)
- Récentes acquisitions 1984-1986 : Choix d'oeuvres du XVIe au XVIIIe siècle
Etape :
Musée du Louvre, Paris, France - 19 juin - 29 septembre 1986
Organisée par : Musée du Louvre-Département des Arts Graphiques (Paris, France)
Dernière mise à jour le 04.11.2021
Le contenu de cette notice ne reflète pas nécessairement le dernier état des connaissances